Entretien avec le créateur de la marque TECHNE

Publié le 21 Février 2014

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Voici un excellent exemple de partenariat international réussi, dans la création d’une marque de montre.

Une ouverture et une franchise exceptionnelle de la part d’un artisan.

Un professionnel de l’horlogerie motivé par l’alliance de la qualité et du meilleur coût, qui ose travailler avec l’élite de la filière asiatique.

Un aperçu des réalisations réussies dans tous les aspects du concept… entrevues depuis des années.

 

J’ai rencontré Franck, le créateur de la marque TECHNE. Il a répondu à mes questions sans ambages.

 

Franck : Tout d'abord, je tiens à vous féliciter pour votre volonté d'indépendance éditoriale. En refusant la publicité, vous évitez le conflit d'intérêt auquel sont confrontés la plupart des éditeurs

 

Jimmy : Je vous remercie Franck. MBA garde cette orientation éditoriale depuis le début. Je ne fais de publicité pour personne, je dirais presque que je n’ai pas d’amis… j’ai des relations équilibrées avec de vrais professionnels ! Le Blog MBA dit en toute Independance ce qu’il pense de la filière !

 

Franck : Vous aviez pourtant placé ma marque de montres en liste noire ?

 

Jimmy : En effet, nous manquions de visibilité, nous avions quelques plaintes, une vision générale qui vous rapprochait du concept sino-germanique. Aucun des distributeurs de ce domaine - à part quelques uns qui se comptent sur les doigts d’une main - n’osent avouer qu’ils ne font que vendre des montres de qualité très discutable, entièrement fabriquées en Chine !

 

Franck : Sur le site technewatches.biz, vous pouvez constater que je ne revendique aucune légitimité historique ni "suissitude", bien que je sois basé en Suisse. Étant hors de l'espace économique européen, j'ai cependant choisi de me conformer aux lois de la communauté européenne en faveur du consommateur : mes produits sont couverts par une garantie de deux ans et j'accepte l'annulation de vente conformément aux recommandations de la CEE. Mes produits sont soumis à des tests de conformité aux normes ISO par des laboratoires indépendants, et je peux vous soumettre ses résultats pour vérification.


Je me demandais si votre opinion sur ma marque est basée sur mon utilisation du chrono Seagull ST1901, qui en soi n'a rien de criminel. Mon homologue Eddie PLATTS, propriétaire du site www.timefactors.com l'utilise également. Or, sa marque PRECISTA, qui a toute l'estime de la communauté Internet, ne figure pas sur votre liste des "bonnes" marques. La marque italienne KIENZLE (www.kienzle.it), qui a tout de légitime et de sérieux, utilise également des variantes du chrono Seagull depuis 2005.

 

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Jimmy : Non, bien sûr, Seagull fabrique de bons produits, sans doute parmi les meilleurs du marché asiatique. Ils ont une bonne réputation, mais en dehors de quelques-uns de leurs calibres installés dans de rares montres vendues en Europe, dont celles que vous citez, on attend toujours chez nous, la distribution de leurs propres garde-temps.

 

Franck : En effet, Seagull construit des mécanismes dérivés des modèles suisses « Venus » dont les moules ont été vendues à la Chine dans les années 60. Ils reçoivent d'ailleurs l'un des meilleurs spiraux de fabrication chinoise, ce qui permet d'obtenir un réglage proche de ce que l'on peut attendre de la part d'un mouvement ETA. Je peux soumette un mouvement à l'horloger de votre choix pour vous permettre de vérifier cette revendication.

 

Concernant les calibres Seagull, je comprends qu’ils m’aient relégué dans la catégorie de nombreuses marques sino-germaniques. En dépit de leurs vertus que j'ai déjà énumérées, ils présentent également quelques points faibles. Comme pour la plupart des mouvements chinois, on joue un peu à la roulette russe avec ces calibres : soit ils fonctionnent comme un charme, soit il y a un petit détail qui cloche. Le talon d'Achille du Seagull est d'être monté avec des poussoirs de conception approximative. Heureusement je décèle la majorité des soucis et je ne laisse sortir que des chronographes qui fonctionnent impeccablement.


Après mon deuxième lot de montres qui furent équipées du Seagull, j'envisage de passer à une architecture plus moderne telle que le Dubois-Dépraz DD2030, un chrono suisse low-cost; ou le NH78, d'une conception optimale: différentiel pour chaque aiguille chorographique. Je déplore un peu le travail d'une marque américaine avec ce très beau calibre japonais, qui aboutit à la braderie sur eBay de modèles fortement dévalués.

 
Jimmy : Mais vous utilisez aussi des calibres japonais ?

 

Franck : Oui, évidemment, Seiko et Citizen n’ont pas à démontrer la précision et le caractère de leurs réalisations, mais je compte introduire des mécanismes ISA et RONDA de conception suisse. Ces deux fournisseurs de renom répartissent leur production entre la Suisse et l'Asie, offrant ainsi un label reconnu.

 

Jimmy : Dîtes-moi Franck, comment un tel projet a-t-il germé dans votre esprit ?

 

Franck : Je suis collectionneur de montres et membre de forums horlogers depuis une quinzaine d'années. Ma passion a influencé le choix de mes études et je me suis orienté vers un domaine qui se prêtait au travail dans une industrie telle que l'horlogerie. Habile de mes mains, j'ai également pu me former de façon à pouvoir effectuer moi-même les manipulations de base sur mes montres, mais je m'occupe également du graphisme, de la communication et de la vente via Internet.


J'ai décroché mon premier poste dans le développement horloger il y a une dizaine d'années. Les entreprises sont souvent propices à des entremêlements de politique et de relationnel, et le produit souffre parfois d'un manque de vision ou d'un réel "sens du produit". Avec la marque TECHNE que j’ai développé en 5 ans, j'ai voulu définir un cadre dans lequel je pouvais créer sans interférences. La mission est donc de proposer des montres ludiques et fonctionnelles qui s'inspirent des nombreuses pièces d'époque, que j'ai eu tant de plaisir à manipuler au travers de ma propre collection.

 

Jimmy : Parlez-nous de vos partenariats avec l’Asie ?

 

Franck : Je travaille principalement avec une PME de Hong Kong qui me fournit en faisant assembler selon les besoins en Chine ou à Hong Kong. C'est une entreprise familiale qui a été validée par la chambre du commerce de Hong Kong et avec laquelle j'entretiens une relation de confiance. Ils coordonnent l'approvisionnement, l'assemblage et le contrôle final, mais par acquis de conscience je fais également tester par un laboratoire indépendant à Hong Kong quelques pièces choisies au hasard.

Mes montres sont principalement vendues aux USA, en Australasie et en Europe. La Suisse est plus laxiste que la CEE en ce qui concerne la protection du consommateur. Je pourrais me contenter d'offrir une garantie sommaire, mais je me conforme aux normes européennes en offrant 24 mois de garantie et un délai de rétractation de 7 jours.

 

Jimmy : Comment réussissez-vous à résoudre le problème de la sous-traitance ?

 

Franck : Jusqu'à présent je m'occupe personnellement du réglage des montres mécaniques, du montage du bracelet choisi par le client, du conditionnement et de l'expédition. Entre 2009 et 2011 j'avais la démarche de me fournir en bracelets en Europe, mais lorsque j'ai compris que certains de mes fournisseurs européens sous-traitaient en Extrême-Orient j'ai décidé d'éliminer les intermédiaires pour pouvoir répercuter l'économie réalisée chez le client. Mes bracelets ainsi que mon nouveau coffret proviennent de Hong Kong et la littérature est imprimée en Chine.
 

Jimmy : Vous attachez donc une réelle importance au service au client, Qualité-Prix ou SAV ?

 

Franck : Entre 2009 et 2013, la vente de mes modèles a considérablement augmenté. La quantité de client nécessitant un suivi étant proportionnée à la quantité de montres écoulées, j'ai atteint mon seuil de saturation il y a un an, avant de commencer à utiliser un logiciel dédié qui m'a permis de conserver un vue d'ensemble. Lorsqu'un client me contacte, je crée une note sur sa requête qui reste visible jusqu'à ce que le problème soit résolu. J'effectue moi-même les réparations de base et je laisse à mon fournisseur le soin de résoudre des problèmes plus complexes.


Je peux en effet, volontiers vous mettre en contact avec des clients à l'origine insatisfaits de mes services, pour lesquels je me suis coupé en quatre afin d'apporter une solution à la hauteur de leurs attentes. Mes clients satisfaits, qui reviennent acheter de nouveaux produits, ne pourrons que vous confirmer mon sérieux.

 

Jimmy : Avez-vous des projets à courte échéance, que comptez-vous entreprendre pour faire mieux connaître votre marque ou la distribuer avec plus de facilités :

 

Franck : L'un des inconvénients de ma localisation en Suisse est que le client majoritairement résident à l'étranger doit s'acquitter de taxes d'importation à la livraison. Pour y remédier, je suis en train de mettre en place une sous-traitance de la logistique. Les montres vont être entreposées sur plusieurs continent et le client bénéficiera de frais de port plus bas, de délais plus court ; et cela simplifiera la compensation de mon empreinte carbone chez Carbonfund.org, chez qui je suis partenaire depuis 2009. Avec ce changement, je pourrai passer à la vitesse supérieure et consacrer plus de temps au développement, à la communication et aux services qui accompagnent mes produits.


Jimmy : Merci Franck pour votre franchise. Rares sont les fabricants récents d’horlogerie qui dévoilent avec autant de précision leur histoire, leur façon de travailler, les méthodes mises en place pour surmonter les problèmes de fabrication ou de distribution. Vous êtes sur MBA, un pionnier et accomplissez ainsi l’espoir qui est la raison d’être de ce Blog : dire la vérité ! Gageons que les futurs clients sauront s’en souvenir !


TECHNE, des montres quartz ou mécaniques au visuel attachant et plein de personnalité. Des prix raisonnables ne dépassant pas 360 euros, pour une qualité démontrée.  link (version française)

 

Source des photos : Phase de Lune  link

 

Rédigé par montres bonnes affaires

Publié dans #Entretiens avec les fabricants

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M
par pitié "garde temps" non ! faut laisser ça aux journaleux prétentieux quand ils parlent de montres à plus de 5000 € ;-)
Répondre
M
Bon, on ne va pas non plus faire les chochotes ! <br /> La définition de ce mot est plus ou moins le synonyme de "chronomètre" et par déformation de "montre", Ce mot n’avait pas le même sens il y a quelques décennies : Le garde-temps était un instrument d’horlogerie d’une grande précision qui devait pouvoir mesurer et "garder" (conserver) le temps. Le garde-temps permettait ainsi de fournir l’heure la plus exacte possible et ceci partout dans le monde. Les premiers garde-temps furent au départ des chronomètres de marine qui étaient d’une importante précision pour l'époque, Les horloges atomiques les remplacent aujourd'hui ! Ce sont donc réellement ces horloges particulières (la plus proche est en Allemagne) qui devraient être appelées "Garde Temps". Ceci dit, par extension, il est vrai que le mot sonne plus "précieux" que "montre" et donc s'applique bien aux montres de luxe, je vous le concède !<br /> Cependant, dans un texte sur l'horlogerie où l'on va utiliser le mot "montre" pratiquement dans chaque phrase, cela rend quand même le texte plus léger et agréable à lire quand on utilise un "synonyme". Vous concèderez aussi qu'il n'en existe pas beaucoup !